Plaisirs d’Expériences Partagées

Jacques Beaujean

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Présentation de l’objectif

Que l’on travaille en institution ou en privé, nous accueillons soit comme intervenant ou psychothérapeute des personnes qui se confrontent à elles-mêmes et qui ont l’impression de ne pas être capables de résoudre leurs problèmes.
Serions-nous différents ? Sommes-nous épargnés par les problèmes ? Non ! Il suffit de voir comme nous sommes conformistes, ancrés dans des habitudes sécurisantes, souvent par peur du jugement d’autrui. Or précisément, c’est dans la rencontre avec l’autre que l’on se révèle combien on est répétitif, prisonnier de ses habitudes ou au contraire audacieux, créatif, cherchant des issues. Bien sûr, nos attitudes sont intimement liées au modèle relationnel des personnes que nous rencontrons. Et a priori, le modèle paraît peu stimulant. Mais détrompez-vous, si le modèle nous paralyse, il est très intéressant. C’est une aubaine pour nous interroger pour nous avec eux.

Cette rencontre à plus d’un titre est privilégiée. D’abord, parce que les consultants se sont mis au travail depuis souvent très longtemps pour tenter d’apporter des améliorations à leurs conditions ensuite, parce que le recours à la consultation psychothérapeutique est une convocation de mise au travail pour eux et nous. Et c’est une rencontre privilégiée en raison de son contenu intime, sincère, à la recherche d’une amélioration d’eux-mêmes.
Comment pouvons-nous exploiter cette richesse ? Comment pouvons-nous la mettre au profit de notre propre développement ?

Certains en feront des recherches, d’autres des théories. Notre ambition est plus simple, nous espérons seulement nous en rendre bénéficiaires et partager ce bénéfice avec d’autres. Un peu comme si ces rencontres allaient stimuler notre besoin de nous rendre plus libres, plus rebelles dans notre besoin d’ouverture et moins conformiste.

Le modèle de la consultation psychothérapeutique

Le psychothérapeute identifie les symptômes psychiques comme des combats pour résoudre un contexte difficile. Il est pris dans la chorégraphie que lui propose le système consultant. Notre présence nous lie aux interactions et nous ne disons pas à l’autre ce qu’il doit faire ou ne pas faire, mais nous nous interrogeons sur notre façon d’interagir avec lui. Sachant que ce que nous avons « subjectivement » sélectionné de son récit nous concerne aussi. Notre regard sur nous permettra d’identifier la responsabilité que nous portons sur la description de nos observations et de chercher à nous clarifier sur nous-mêmes. Si cette clarification nous permet d’avancer, elle fera, par le reflet de nos questionnements, progresser l’autre.

Quelle est la raison d’être du travail ?

Certains passages du récit de la relation thérapeutique nous interpellent. A priori, nous ne savons pas immédiatement pourquoi. Nous tentons d’approfondir d’abord la question en nous. S’il y a insécurité ou traumatisme, il est sans doute préférable d’en référer à quelques rapprochements personnels. Cette élaboration viendra étoffer leur récit. Nous faisons aussi appel à nos ressentis éprouvés dans d’autres situations, nos lectures, notre imaginaire. Nous nous interrogeons sur ce vécu et nous le formulons sous forme interrogative comme piste d’une réflexion commune possible. Nous avançons à tâtons exactement comme eux, dans le brouillard, en recherche de partage et d’éclaircies.

Parfois, le processus du travail se déroule sous cette forme, mais le plus souvent l’ambiance conflictuelle ou désespérée neutralise notre capacité de ressentir quoi que ce soit. Nous sommes dans un brouillard épais devant quelque chose vis-à-vis duquel nous faisons sans doute un énorme déni, un point aveugle, une de nos multiples faces cachées. Nous devons prendre du recul. Ça parle quelque part en nous sans que nous sachions où. Nous sommes submergés, incapables de rassembler nos émotions. Nous pourrions avoir peur de rencontrer à nouveau la problématique. Ces points de rupture peuvent arriver à n’importe qui. Ils nous procurent beaucoup d’insatisfactions parfois même d’insécurité.

Pour renouer avec le plaisir de la rencontre, il s’agit de nous reconnaître dans cette réalité difficile. De nous la rendre proche et de l’assumer par des choix flexibles et ouverts. En se réappropriant le sens qu’elle a eu pour nous et par expansion peut-être pour nos consultants aussi.

Quel est le processus du travail ?

Comment pourrions-nous nous rendre disponibles à ce travail ?
Nous avons la matière première de la rencontre avec la construction que nous avons partagée avec le consultant dans l’objectif d’une élaboration de nos échanges, car ceux-ci sont des dialogues. Ils sont comme le dit Edgar Morin en tension, ils s’alimentent l’un de l’autre dans une alternance imprévisible sans jamais fusionner ou se nier.
Il y a la narration des faits et des évènements avec de-ci de-là des réflexions sur le vécu qui s’étoffe parfois à l’aide de nos questions. Le récit prend corps d’une manière parfois très différente, et donne sens à une reformulation sur laquelle les protagonistes tombent d’accord ou éprouvent le besoin d’y revenir. Non pas que le but soit de tomber d’accord, mais pour y associer d’autres évènements de telle sorte puissent se dire qu’ils ont appris ou le remettre en question une prochaine fois afin de l’affiner en lui donnant un autre sens ou de l’extension.

C’est ce contenu qu’il faut livrer aux collègues. D’abord dans le registre d’associations verbales, mais aussi corporelles. Quelle posture pourrais-je prendre pour représenter l’image que ce récit donnerait à mon corps ?
Il ne s’agit pas ici de considérer le récit comme une catharsis pour le thérapeute comme pour le consultant. Ils deviendraient des témoins qui renforceraient passivement ce récit comme vérité. Mais de le reprendre comme un mélange de fictions, de rêves, une histoire en suspens. C’est le but de la posture corporelle qui le représente afin d’y introduire un imaginaire actif. On pourrait dans le cadre des supervisions y introduire la poésie, un comte, une sculpture corporelle, une musique, etc..

En guise de conclusion

Ce qui détermine le plus les progressions pour les consultants et les intervenants, sans pourtant abandonner les théories, c’est la capacité de partager entre eux une congruence, une authenticité, une alliance dans la patience et la confiance. Cela demande un sentiment de respect et d’humilité, reconnaissant sa vulnérabilité à ne pas avoir de meilleures réponses que celles qu’ils vont sans aucun doute être capables de trouver. Cela suppose, selon nous, que nous ayons nous aussi tenté d’apporter quelques tentatives de réponses à ce que notre interaction avec eux a fait naître en nous.

Pour ceux qui se sont inscrits sur le site (inscription gratuite), vous trouverez une suggestion de modèle sur le lien ci-dessous :

https://www.systemique.be/ecrire/?exec=article&id_article=476

Comment mettre en place une vignette sur le site pour qu’elle soit partagée avec un groupe ?

https://www.systemique.be/ecrire/?exec=article&id_article=856

Où trouver un complément d’explications et commentaires par Vincianne Despret ?

https://www.systemique.be/ecrire/?exec=article&id_article=958

La petite histoire de la vignette de savoir d’expérience

 https://www.systemique.be/ecrire/?exec=article&id_article=609

Un article sur la vignette de lecture de 2005 sur la théorie :

https://www.systemique.be/ecrire/?exec=article&id_article=188

Bibliographie

https://www.systemique.be/ecrire/?exec=article&id_article=272

https://www.systemique.be/ecrire/?exec=article&id_article=251

https://www.systemique.be/ecrire/?exec=article&id_article=940

Livre de Jacques BEAUJEAN paru aux Éditions érès

Coopération et approches systémiques
Individus, couples, institutions, fomation

Éditions érès

Beaujean Jacques (2009), « Coopération et approches systémiques » Individus,couples, institutions, formation, Édition Érès.
 Cancrini Luigi (2009), « L’océan borderline », Troubles des états limites, récits de
voyages, Édition De Boeck.
 Gaillard Jean-Paul (2018), Enfants et adolescents en grande difficulté : la révolution sociothérapeutique ESF.
 Beaujean Jacques, Neirynck Isabelle De la danse thérapeutique au savoir
d’expérience Thérapie Familiale 2018/3 (Vol. 39), pages 231 à 238
 Beaujean, Neirynck, Pugin : Le réseau d’échange de vignettes de savoir
d’expérience Thérapie Familiale 2008/1 (Vol. 29), pages 143 à 153
 Beaujean, Neirynck, Pugin : Partager et échanger son savoir d’expérience,notamment par le biais d’un réseau d’échange collaboratif : une dépendance qui peut favoriser une autonomie dans sa pratique professionnelle ?

Pour télécharger le syllabus, cliquez sur le fichier dessous :